Que les Noirs américains harmonisent provient assurément des cérémonies religieuses. C'est le chant réponse, qu'on croisera sur les disques soul de la décennie 1960. Un soliste chante une phrase et X personnes répètent tout de suite la même chose. Le tout s'est adapté à la forme profane dès les années 30, avec un sommet de popularité au cours des 1940, avec des gens comme les Delta Rhythm Boys, Cat & The Fiddle, mais surtout les Ink Spots et les Mills Brothers. Ces groupes, n'en doutons pas, s'adressaient à un grand public, en majorité Blanc. Les harmonies vocales façon doo-wop s'adressaient essentiellement à des Noirs, du moins au dèbut.
Quand il est question du style, on pense onomatopées : les dip dip boom sha la la etc. Ceci est typique des disques apparus après 1953 et est associé à l'ère rock & roll et du rhythm & blues. Avant, il y a eu une autre phase, de 1948 à 1953, où il n'y avait pas d'onomatopées, mais un chant à la façon des Ink Spots et des frères Mills.
On considère les Orioles comme les instigateurs du genre. Une roucoulade romantique comme It's Too Soo To Know était profondément noire. Quand leur soliste Sonny Till se lançait dans cette chanson, les femmes d'ébène de l'assistance criaient, s'arrachaient les cheveux, s'évanouissaient. Étonnant, non ? Le succès initial des Orioles a inspiré maints groupes à changer de nom, au profit d'un nom d'oiseau, puis à imiter la bande à Sonny. C'est ce que j'appelle l'effet gazouillis, avec beaucoup de Ooouuuuu. Le genre s'est intégré au R & B naissant, pour les pièces aux tempos rapides.
Voici cinq exemples. Notons qu'hors les Flamingos, aucune de ces formations ne survivra à l'apparition du doo-wop avec onomatopées, malgré leur grande popularité. La photo ci-haut : les Orioles.
Pour écouter les Mills Brothers, suivez ce lien :
http://mariomusique.vefblog.net/50.html#Les_culbutes_vocales_des_freres_Mills
Pour les Ink Spots, c'est par là :
À mon avis, ce méga succès de 1961 a été le plus extraordinaire 45 tours de la vague de groupes d'harmonies vocales, si présent entre 1948 et 1963. C'est un disque accrocheur, qu'on aime après deux secondes d'écoute, qui nous fait bondir et tenter de chanter comme le basson Fred Johnson, en grande partie responsable de la gloire du disque, avec ses onomatopées amusantes.
Blue Moon était un standard romantique, en circulation depuis les années 1930, sans cesse repris par des musiciens et artistes de tous les styles. Cependant : toujours une chanson lente. L'idée d'accélérer la ritournelle provient de... non, pas des Marcels! Que ce soit eux ou quelqu'un de leur entourage, il y a eu un emprunt (ou un vol) d'un disque invendu de 1958 par un obscur groupe du nom de Emanons. Quoi qu'il en soit, les Marcels l'ont fait de meilleure façon.
Ce truc se mettait en marche et écrasait tout sur son passage. Le chanteur soliste était excellent, ses copains harmonisaient très bien, mais ce qu'on voulait entendre, c'était Fred Johnson.
La gloriole des Marcels a été de courte durée, puisqu'il y a eu tendance à la répétition, comme cela se faisait souvent à cette époque : reprendre un vieil air romantique, l'accélérer et faire : "Vas-y, mon Fred!"
Au cours des semaines suivantes, je vais me concentrer à vous présenter diverses facettes de ces artistes d'harmonies vocales, qu'un désoeuvré allait baptiser du nom de Doo Wop. C'est un genre que j'affectionne beaucoup, riche en surprises et en découvertes.
2. MarioMusique le 07-12-2017 à 22:39:06 (site)
Je ne me lasse pas de ce disque !
3. Maritxan le 08-12-2017 à 23:57:03 (site)
J'aime beaucoup ! J'ai écouté cette chanson trois fois de suite... c'est tout dire !
4. MarioMusique le 09-12-2017 à 00:21:11 (site)
C'est dynamique et amusant.
Ce disque, double, est une nouveauté, mais je ne crois pas qu'il s'adresse à un large public. Aux admirateurs des Stones, c'est certain. Il s'agit d'un regard sur les premiers jours du groupe, par la voie d'émissions de radio britanniques, que ce soit pour jouer en studio ou retransmettre un spectacle. On y compte pas moins de 56 chansons (pas très longues, cela va de soi) et trois courtes participations de Mick Jagger et de Brian Jones. Si la pochette indique 1963 à 1965, 1964 vole la vedette. Il y a peu de chansons signées Jagger-Richards, la grande majorité étant des reprises d'artistes noirs américains, dont plusieurs de Chuck Berry et de Bo Diddley. Certaines de ces chansons reviennent trois fois. Chose intéressante : six chansons ne seront jamais enregistrées en studio par les Stones. Les sources radiophoniques et leur état de conservation étant différentes, il y a des écarts entre les séquences, dont les dix premières pièces du second disque sont presque inaudibles. Ce n'est pas un produit essentiel, mais un rappel différent de ce que l'on connaît par la voie des 33 tours officiels de 1964 et 1965. C'est parfois plus débridé et rude que ce que l'on connaît. Mes motivations pour les quatre choix.
ROLL OVER BEETHOVEN : De Chuck Berry. Jamais entendu avant par les Stones. Représentatif des premiers enregistrements des Pierres.
ROUTE 66 : Version plus intéressante que celle que l'on croisera sur le disque December's Children.
I JUST WANT TO MAKE LOVE TO YOU : L'enregistrement est laid, mais il y a là une grande énergie, les cris des filles, puis une finale turbulente nous prouvant pourquoi la bande à Jagger était considérée comme des voyous du rock & roll. Une reprise d'un titre de Muddy Waters.
SATISFACTION : La guitare fuzz de Keith Richards est moins en évidence que sur la version 45 tours de ce classique.
1. jakin le 06-12-2017 à 16:01:08 (site)
Des pièces intéressantes pour l'anecdote, mais il y a bien longtemps que les pierres ne roulent plus...
2. MarioMusique le 06-12-2017 à 22:00:01 (site)
Ah si, ils roulent très bien. Vois ceci :
http://mariomusique.vefblog.net/96.html#Rolling_Stones__Racines
Les microsillons enregistrés par le saxo ténor Stanley Turrentine au cours des années 1960, pour la compagnie Blue Note, sont parmi les meilleurs de cette époque. L'homme avait dix années d'expérience avant de se lancer en solo, entre autres pour Ray Charles. Il s'agit de jazz teinté de soul. La suite sera moins agréable... jusqu'à un retour vers son style initial, au cours de la décennie 1980. L'homme est décédé en 2000.
Stanley Turrentine, Little Sheri, 1961, Look Out
1. jakin le 05-12-2017 à 17:38:26 (site)
C'est excellent.... je crois qu'il était en couple avec l'organiste Shirley Scott....
2. MarioB le 05-12-2017 à 18:05:07 (site)
Exact. Ils jouaient sur les disques de l'un et de l'autre, mais la femme est absente sur celui-ci.
On a raconté beaucoup de choses sur Lindbergh. Que cette chanson allait faire basculer le rock québécois vers la modernité. Vrai, mais pas entièrement immédiat. Les musiciens d'ici, au diapason de l'ère Beatles, avaient suivi cette route, mais en ignorant le chemin psychédélique et hard-rock. Ils le feront graduellement après ce disque. On a aussi dit que Lindbergh est le premier disque à se servir de l'argot joual. Faux! Des gens comme Tex Lecor, Serge Deyglun et les folkloristes l'avaient fait avant. On a aussi raconté que pour la première fois, un blasphème (Crisse) était utilisé sur disque. Entièrement vrai. Un fait qu'on ne dit jamais : Lindbergh était la face B de California. Notez, sur l'étiquette...
Pourquoi la radio a-t-elle fait un succès d'une chanson autant anti-commerciale de face B ? Ma théorie : Le Crisse de Robert, répété, ô grand péché, par une femme. De ce fait, Lindberg doit beaucoup à la présence de Louise Forestier, jusqu'alors une chanteuse sage, qui s'exprime ici avec des interventions autant habiles que surprenantes, délirantes.
Robert Charlebois a passé sa vie à chanter Lindbergh et on croise souvent des versions sur ses disques en public, sans jamais approcher, ni même frôler l'étincelle du disque d'origine.
Deux faits : 1)- Le titre n'est jamais dit dans la chanson. 2)- La Sophie que Charlebois tente de rejoindre par avion existait. C'était alors la petite amie de l'auteur du texte, Claude Péloquin, poète de la contre-culture.
Quant à California : aucun problème, c'est une excellente chanson, avec toujours Louise Forestier qui s'exprime. L'année précédente, Charlebois avait séjourné chez les hippies californiens, ce qui l'avait beaucoup marqué. Il l'exprimera par la chanson Complainte de presqu'Amérique et par California.
2. MarioB le 04-12-2017 à 22:46:58 (site)
Mine de rien, ces deux-là connaissent de très longues carrières, sans doute la plus longue pour une femme, dans le cas de Louise Forestier, toujours active
Commentaires
1. Maritxan le 08-12-2017 à 23:58:52 (site)
Je préfère les Marcels.
2. MarioMusique le 09-12-2017 à 00:20:36 (site)
C'est certain que les femmes préfèrent des Marcels.
3. jakin le 12-12-2017 à 08:38:18 (site)
Toutes ces pièces sont intéressantes et j'ai passé un bon moment aussi avec les liens...
4. MarioMusique le 12-12-2017 à 08:51:50 (site)
C'est certain que les pièces lentes peuvent paraître datées, mais elles ont un grand charme.