Quel est le disque le plus vendu, aux USA, à l'ère du 78 tours ? Louis Armstrong, Bing Crosby, Glenn Miller, Duke Ellington ? Non ! Vernon Dalhart et The Prisoner's Song : sept millions de disques écoulés. Curieux, car c'est un enregistrement plutôt médiocre, mais il faut croire que le sujet avait rejoint le commun des mortels, qui se rendait au cinéma ou au théâtre pour pleurer. Or, cette chanson est trrrriste et on imagine tous ces braves gens verser des torrents pour ce pauvre prisonnier condamné et qui voudrait avoir des ailes pour s'échapper de sa cellule et passer quelques instants entre les bras de son amoureuse, afin de pouvoir mourir le coeur en paix.
Ah, la chanson "de rue" de France ! La chanson sociale ! Nous avons ici droit à un voyou, un vilain mec qui fait peur aux bourgeois, le tout sur un air d'accordéon. Trève d'ironie : comme toutes les chansons françaises des années 1930, c'était très bien écrit. Henri Garat, comme tant d'autres, alliait la scène, le cinéma et les disques. Au cours de la décennie 1940, Henri Garat fait sans cesse la manchette, à cause de scandales. Il était devenu un véritable mauvais garçon... La chanson provient d'un film du même titre.
Curieux de A à Z ! Un fait est certain : Cleo Brown est la première de la catégorie "Chanteuse devant un piano". Je n'en connais aucune autre avant et des douzaines par la suite. Elle avait une façon inhabituelle de chanter, avec des grondements, des élans respiratoires. Un mot sur son jeu de piano : sautillant et dynamique, un peu à la façon de Fats Waller. La musique, que je qualifie ici de jazz, était en réalité du proto rhythm & blues, une quinzaine d'années avant la vague. Je ne vous parlerai pas des propos parfois bizarres de ses chansons... J'explique la comète : Cleo Brown a enregistré une trentaine de titres en 1935 et 1936, puis plus rien, en omettant une tentative de retour au début de la décennie 1950. En conclusion : tout ceci a de la gueule et demeure très, très unique.
Il y a une part de mystère entourant Tommy McClennan : sa date de naissance est incertaine, tout comme celle de son décès. De plus, comme dans certains autres cas pour les artistes de blues, il n'existe qu'une photographie de lui. Il enregistre près d'une cinquantaine de titres pour la firme Bluebird entre 1939 et 1942, mais personne ne connaissait ses antécédents, puis après 1942 : plus rien.
La première fois que j'ai entendu ce disque, j'étais adolescent. Je venais de me procurer un double album mal intitulé The Golden Age Of Rhythm & Blues et qui présentait des obscurités de la scène d'harmonies vocales des années 1950, gracieuseté de la compagnie Chess.
Au moment de ce microsillon, Red Norvo faisait déjà partie des encyclopédies, cité comme le premier joueur de vibraphone de l'histoire du jazz. Il fut très populaire au cours des années 1930 avec son petit orchestre, mais aussi en compagnie de son épouse, la chanteuse Mildred Bailey. Norvo touchait aussi au xylophone et au marimba. Le jazz avait changé, vingt-cinq années plus tard, mais Norvo n'adoptait pas la carte de la nostalgie. Ce disque est particulier. Pas du blues comme on a l'habitude de le concevoir, mais une certaine version jazz du blues, avec des rythmes lents, paresseux, nocturnes. Norvo n'y prend pas la vedette. De ce fait, certaines de ses interventions sont courtes. Cet enregistrement doit beaucoup au saxophone de Ben Webster et à la trompette de Harry Edison. Quoi qu'il en soit : un disque unique et séduisant. La pièce que je vous propose est représentative de l'ensemble. Red Norvo est décédé en 1999.
La période 1960-1963 est marquée par une série de danses à la mode, la plupart du temps éphémères, dont certaines ridicules. Pas de procès de ma part : c'était de la bonne rigolade pour les gens de cette époque. Le personnage le plus en vue dans le domaine était Chubby Checker. Non seulement a-t-il popularisé le Twist, mais il a lancé d'autres danses.
Dansons les patates écrasées ! Tout était dans le jeu de pieds, qui piétinnaient des pommes de terre fictives. Les pieds se tordaient vers l'intérieur, puis vers l'extérieur, dans un mouvement continuel. J'imagine que si une personne dansait le Mashed Potato pendant une heure, elle avait mal aux pieds pendant les deux suivantes. J'imagine aussi que les créateurs de ces danses étaient à court d'idées et qu'ils étaient écroulés de rire en décidant que les patates écrasées seraient le gros truc de 1962.
Une danse arrivée tardivement dans le mouvement, mais qui allait être encore d'usage à l'ère Beatles. Tout le monde a déjà vu des images ou des films de jeunes, face à face, pliant les genoux, tout en balançant les mains de haut en bas et de bas en haut, donnant l'impression d'être un singe qui grimpe à un arbre. C'était ça, danser le Monkey !
Un détour par la culture pop du Québec. En effet, personne en France, en Angleterre ou aux États-Unis ne dansait le Ya Ya. Au Québec, le nom était présent, non seulement dans la chanson initiale, mais dans d'autres succès du palmarès. À l'origine : une chanson R & B de la Nouvelle-Orléans par Lee Dorsey, en 1961. Elle est reprise par de nombreux artistes du temps, dont Trini Lopez, en 1964. C'est là que Joel Denis trouvera son modèle.
L'alligator ? Je ne me souviens plus avoir croisé cette danse... Il y en a eu tant et tant ! Les gens du temps dansaient-ils vraiment le cidre à la canelle (Cinnamon Cinder, en 1963) et le Swim ? C'était rigolo et sans prétention, sauf que le marché a été saturé par cette idée. L'arrivée des Beatles allait calmer la folie des danses folles, bien qu'on en croisait encore un peu en 1964.
Curieux destin que celui de ce groupe québécois ! Ils en ont vu de toutes les couleurs ! Les musiciens provenaient de l'entourage de Robert Charlebois et pouvaient compter sur Marcel Sabourin, souvent parolier pour Charlebois. Il n'y a eu qu'un seul microsillon de Vos Voisins. À vrai dire, pas très bon. Il y avait quatre rocks, dont trois très uniques, puis des balades difformes et sans aucun intérêt. La pochette du disque imitait le journal Allo Police, empruntant le logo de cette entreprise. Or, le journal n'a pas du tout apprécié que ces chevelus ne leur demandent pas la permission et une menace de procès à la compagnie de disques Polydor a fait en sorte que le 33 tours a été retiré rapidement de la circulation. Or, deux chansons tournaient à la radio rock F-M et le disque était sur toutes les platines des DJ de boîtes rock. Bref, tout le monde pouvait entendre ce disque, mais personne ne pouvait l'acheter, moi le premier !
Avec ses premiers disques, au milieu des années 1960, rien ne laissait présager que John Hammond mènerait une carrière de plus de cinquante années, tant il chantait mal et semblait sans cesse en faire trop. Les Américains de cette époque se demandaient encore si les Blancs avaient le droit de chanter du blues. Surtout pas comme John Hammond ! Par contre, à partir de 1967, l'homme se calme un peu et offre des disques satisfaisants. Hammond n'a jamais eu une bonne voix, mais sa démarche a toujours été honnête et motivée par son amour du blues. De ce fait, il n'a presque jamais enregistré de chansons provenant d'artistes blancs. Il a su adapter de belle façon des airs de rock en blues, tout comme des pièces soul. On peut lui reprocher d'avoir offert les mêmes chansons à quelques reprises. Il y a toujours du bon à bouffer sur les disques de John Hammond. Sauf les premiers...
Les meilleurs organistes de jazz des 25 dernières années sont des femmes. Sans doute parce qu'elles ont davantage de musicalité que leurs confrères, qu'elles ont aussi le sens de la mesure. Linda Dachtyl est une enseignante en musique qui se produit en petite formation jazz et ne met pas du Hammond dans tous les coins, donnant la chance aux autres musiciens de s'exprimer. Le disque illustré ci-haut est excellent !
Candye Kane est une ancienne comédienne de films d'épiderme qui s'est lancée dans une seconde carrière, celle de chanteuse, au début des années 1990. Son style est "Blanche qui chante comme une Noire" : Soul, blues, parfois jazz, mais surtout le R & B juteux de la période 1945-1955, avec une profusion de chansons à double sens. Ajoutons à l'ensemble une forte dose de bonne humeur communicative.
Fermons pudiquement les yeux sur les changements de personnel : Les Japonaises de Shonen Knife sont le groupe de rock féminin qui a battu tous les records temporels, puisque la formation existe depuis 1981. Seule la chanteuse et guitariste est de la bande depuis les débuts. Shonen Knife a retenu une leçon de leurs idoles les Ramones, du moins pour les premiers disques des faux frères : le rock doit être simple et rigolo. On s'amuse ferme avec Shonen Knife, surtout avec leurs nombreuses chansons à propos de la nourriture ! Ne pas oublier les pochettes de disques enfantines et colorées. Que du bon temps et des sourires !
J'ai déjà entendu des disques de cette chanteuse et de l'orchestre sans que cela ne m'impressionne. Pourtant, dans le cas de ce CD, cette rencontre produit des petites étincelles rendant le tout excitant. Le matériel donne certes un coup de main : des chansons célèbres de Duke Ellington, chantées par Ivie Anderson, au cours des années 1930. À vous de juger ! Pour ma part : très bon disque de jazz. Je souligne que la femme sur la pochette n'est pas Deborah Brown, mais Ivie Anderson.
Si vous désirez découvrir du bon blues, tournez-vous vers cette australienne, chanteuse à la voix ferme, autant à l'aise à la guitare acoustique qu'à l'électrique. Fiona Boyes est active sur disque depuis 1990, alors qu'elle faisait partie d'un groupe du nom de Mojos. Depuis 2001, elle vole de ses propres ailes.